Constat & essai sur la pensée critique dans la société
Publié : 28 août 2011, 22:24
Constat et essai sur le non-enseignement de la pensée critique dans nos sociétés
Depuis plusieurs mois, je ne participe plus activement sur le forum, mais je viens y lire régulièrement. Souvent, j’apprends des trucs, souvent, je me bidonne, mais, surtout, je réalise de plus en plus (à chaque fois que j’apprends ou que j’affine mes raisonnements en vous lisant) que les gens de la grande classe dite « moyenne » manquent cruellement d’instruction et de connaissances. Je comprends de plus en plus les motivations et objectifs des associations sceptiques (ou d’esprit critique, zététique, etc.).Naturellement, il y aura toujours des cas extrêmes : des gens très crédules, des gens peu doués intellectuellement, des gens très fermés d’esprit, etc., et nous n’y pouvons rien. Mais souvent, je discute avec des gens qui manifestement ont un certain potentiel intellectuel, seulement, il m’apparait évident qu’ils n’ont pas eu les outils et l’encadrement nécessaire pour apprendre à bien raisonner. Je trouve cela dommage et en même temps très frustrant de tenir certaines conversations avec certains individus, car souvent il faut partir de tellement loin (dans leurs erreurs de raisonnement) qu’il m’apparait même totalement inutile de discuter du sujet initial. J’en viens même à penser qu’il serait nécessaire d’inclure des cours de syllogisme, de sophisme et de pensée critique (simplifié et adapté, bien sûr) dès la petite école.
Au Québec du moins, la philosophie, la logique formelle, la rhétorique et la dialectique, entre autres, ne sont que « survolées » au secondaire (et encore, bof, bof,…). Bien sûr, ils sont abordés au cégep (lycée), mais il m’apparait que : ces sujets sont abordés trop tard dans le cours du développement intellectuel des individus, certains ne sont qu'effleurés rapidement si l'on ne s'oriente pas dans un secteur ou domaine les nécessitant, un nombre significatif d’individus ne font même pas d’études intermédiaires ou supérieures, et finalement, lorsque, sur le marché du travail, peu d’adultes s’intéressent à tous ces sujets. Prenons seulement les biais cognitifs p. ex. ! Sachant que ces derniers affectent et altèrent nos jugements au quotidien, je ne comprends pas pourquoi ils ne sont pas présentés, enseignés, ou, du moins, intégrés de quelque façon que ce soit dans les programmes d’éducation scolaire? Il me semble que c’est de toute première importance parce que, de toute façon, nous porterons des jugements sur toutes les autres matières qui nous seront enseignées (histoire, philosophie, etc.).
Le principal point commun entre tous les hommes et les femmes — point qui les différencie du règne animal — est la faculté de penser et de réfléchir! Il est donc curieux que nos sociétés modernes actuelles n’accordent pas le même degré d’importance envers tout ce qui concerne et affectent le raisonnement et le discernement, par rapport à l’importance qu’ils accordent aux autres matières? Pourquoi un cours d’introduction à la pensée critique enseignant les bonnes et mauvaises façons de réfléchir, de raisonner ou de penser n’est pas enseigné dès le primaire? Plus curieux encore que certaines matières, concernant de près ou de loin la pensée, ne soient enseignées que lors des études intermédiaires ou supérieures? Pourquoi attendre d'atteindre ces derniers niveaux? Pourtant on nous enseigne bien les bases de la mathématique dès le début du cheminement scolaire! Savoir compter est important, mais savoir penser et discerner judicieusement l'est tout autant, d'autant plus que cela nous sert dans tout, pour tout, et à chaque instant de notre vie!
Je pense qu’il est admis que le cerveau des enfants intègre les connaissances beaucoup plus facilement et rapidement que celui des adultes. Il est aussi reconnu (je pense) que c’est majoritairement à l’adolescence que les principaux choix cruciaux (qui sont déterminant en ce qui concerne les valeurs, les croyances, et la façon de penser) s’encrent profondément dans l'individu pour le reste de sa vie. Pourquoi attendre pratiquement la fin de ce stade de développement avant d'aborder certaines notions concernant l'outil que nous allons utiliser le plus au cours de notre vie (la pensée)? Bref, la capacité la plus importante de l’homme est pour ainsi dire laissée à tout un chacun, sans réelle formation, et ce, jusqu'à la fin de l'adolescence. Moi-même, faisant partie de la classe moyenne, n’étant pas un professionnel et ayant quitté l’école assez tôt, je réalise que j’ai perdu plusieurs années de ma vie à croire à des trucs absurdes! J’ai eu la chance de me « récupérer » moi-même, mais assez tardivement par contre, et surtout à cause d’un fort esprit d’autocritique et d’une curiosité hors du commun. Avec le recul, j’aurais aimé être mieux encadré, j’aurai aimé qu’on « m’apprenne à penser » plus tôt.
D’un autre côté, je crois deviner les raisons qui font qu’il n’y a pas de cours de pensée critique qui soit enseigné dès le plus jeune âge. Peut-être parce que les mots « raisonner », « réfléchir » et « façon de penser » nous paraissent indissociables de la notion ou du concept « d’être ». Être et penser nous paraissent être pratiquement une seule et même chose ( d’où le fameux « je pense donc je suis » de René Descartes). C’est pourquoi, sans doute, que l’homme n’as pas été, et n’est pas ouvert à l’idée de se faire dire (enseigner) comment réfléchir, ou comment « bien » penser! De plus, les croyances et valeurs étant différentes selon les cultures, mais aussi au sein même des différentes familles d’une même culture (ainsi que pour chaque individu), il serait difficile de prétendre pouvoir enseigner comment « bien penser » alors que les valeurs et croyances de tout un chacun résultent — en grande partie — des réflexions que chacun effectue à propos de tout et de rien. Se faire enseigner comment réfléchir susciterait donc (chez la plupart des gens) la peur de se faire imposer comment penser, et donc, comment être! C'est peut-être ce qui explique pourquoi tout ce qui concerne la pensée et le raisonnement n'est abordé que : soit de façon dispersée au travers des domaines très spécifiques, soit au travers la philosophie (mais qui est enseigné que tardivement), soit à la maison. Donc, jusqu'à un certain âge, avant d'effleurer la philosophie et certaines autres matières qui pourraient être utiles dans le développement de nos raisonnements, cet enseignement est laissé à la discrétion des parents. Mais la nature humaine étant ce qu'elle est, les parents semblent plutôt être portés à transmettre leurs idées, valeurs et croyances. Autrement dit, les parents cherchent beaucoup plus à se « reproduire » au travers leurs enfants plutôt que d'enseigner les moyens ou les outils qui permettraient à ces derniers — par eux même — d'effectuer leurs propres discernements. Pour la majorité, les parents éduquent au sujet des règles de bienséance tout en tentant de transmettre leur « façon de penser » (et croyances). Peu possèdent la sagesse ou les connaissances nécessaires pour enseigner convenablement à propos du raisonnement et du discernement. Bon, mais rien ne sert de jeter le blâme sur les parents, car comment pourraient-ils enseigner quelque chose qui ne leur à pas été enseigné?
Que ce soit à la petite école ou à la maison, nous n’apprenons rien sur les processus du raisonnement en lui-même. Soit on nous enseigne des procédés très spécifiques, comme p. ex. comment effectuer les multiplications/divisions (mathématique), soit nos parents tentent de nous convaincre de faire les nôtres leurs opinions, valeurs et croyances. Bien sûr, certains individus provenant pour les uns de milieu plutôt aisé, intellectuel, ou encore ayant fait des études supérieures, pourraient s’objecter et rappeler que certaines matières comme la logique formelle, les syllogismes, les sophismes, la dialectique, la rhétorique et la philosophie, entre autres, traitent précisément du raisonnement et de la pensée! Oui, ils auraient raison, je le concède, mais, comme dit précédemment, ces sujets sont pour la plupart survolés rapidement à moins de se spécialiser dans un domaine nécessitant leur étude. De plus, ils sont abordés plutôt tardivement par rapport au développement de l’individu et surtout, la grande majorité de ce qui constitue les classes dites « moyennes » de nos sociétés, donc des individus, soit non pas eux la chance de les aborder, soit ne s'y intéresse pas vraiment. Force nous est de constater qu’il n’existe aucune synthèse réunissant les principaux points importants de ces différentes matières, ni aucune adaptation simple, non ennuyante et accessible à tous. Et même si existait un programme, un cours présentant une synthèse du genre, certains s'opposeraient probablement à ce qu'il soit enseigné à leurs jeunes enfants j’imagine.
Nous pouvons supposer que puisque l’homme n’aime pas avoir le sentiment de se faire dire quoi et comment penser (et que certains cherchent à préserver des traditions ou croyances), nous avons laissé les connaissances sur la pensée et le raisonnement être dispersé dans des matières spécifiques, sans jamais tenter de les réunir pour formé une méthode d’apprentissage générale, enseignable à toutes et tous, dès le plus jeune âge. Nous pouvons aussi supposé que certaines personnes, par sentiment de supériorité, n’ont tout simplement pas envie de partager les moyens servant à raffiner le raisonnement. Enfin, nous pouvons supposer que certains régimes (disons « moins démocratique ») n’aient pas intérêt à ce que les gens du peuple s’instruisent et améliorent leur raisonnement. Bref, peu importe les raisons, le fait est que l’homme n’a pas su ou pu développer et instaurer un enseignement généraliste traitent des bases du raisonnement et étant enseigné au même titre que les langues, les mathématique ou les autres matières essentielles, et ce, dès le plus jeune âge.
L’homme a le besoin de sentir qu’il a la liberté de choisir et c'est normal, mais encore faut-il qu’il soit en contact avec les informations nécessaires pour faire ses choix, ou à tout le moins, d’avoir la chance d’avoir des parents un minimum instruit ou possédant un bon discernement! Naturellement, je suis conscient qu’il y a des exceptions, bien sûr que certaines classe de la population sont plus instruite, mais avouons que la grande majorité des gens, ceux que l’on nomme « M. et Mme tout le monde » et qui font partie du « peuple » quittent généralement assez tôt les études pour commencer à travailler. Soulignons également que la façon de raisonner des gens ne fait pas tout! Nous avons aussi des gênes et des émotions, entre autres. Aussi, on peut être riche, instruit, ou faire partie d’une sphère privilégiée de la société tout en raisonnant maladroitement, c’est évident, mais de façon générale (au Québec du moins), je constate que beaucoup de gens sont peu instruits, possèdent peu de culture et raisonnent maladroitement. (À ce sujet, je préfère nettement discuter avec des Européens, car souvent, leur niveau, ne serait-ce que de culture générale, me semble être à des années-lumière de celui du « Québécois moyen ».)
Depuis quelques décennies, jamais l’homme n’a été aussi savant et connaissant. Tous les domaines ont connue une explosion au niveau des connaissances. Mais j’observe que cette explosion de découverte et de connaissance tend à créer un fossé de plus en plus grand entre « les gens du peuple » et les gens instruits (ou les professionnels). De plus, les connaissances en divers domaine deviennent tellement nombreuses qu’il est de plus en plus difficile d’être à jour et instruit dans plusieurs domaines à la foi. De plus en plus, nous nous retrouvons donc avec une « masse populaire » d’individus ayant un plus grand écart de connaissance par rapport à certaines sphères dites « intellectuelles » ou « professionnelles ». Autrement dit, par le passé, la différence entre ce que le peuple savait, par rapport aux gens les plus instruits, devait être beaucoup moins importante que de nos jours. P. ex. en psychologie sociale et autres domaines connexes, plusieurs découvertes, avancées et développements ont été faits au cours des 60 dernières années, mais malheureusement ces sujets ne sont pas publicisés, ni enseignés à la petite école, et demeurent donc pratiquement inconnus du grand public. Seul ceux qui oeuvrent dans des sphère spécifique, comme p. ex. les sciences, la finance, le marketing, la publicité, la politique, le management, la gestion, etc. ont accès à certaines connaissance qui, forcement, peuvent les avantager par rapport au reste de la population, ce qui contribue à creusé le fossé entre les « gens du peuple » et les « privilégiés », instruits ou appartenant à des sphères spécifiques. Bref, tout comme un fossé est en train de se creuser entre les riches et les pauvres, j’ai l’impression que le même phénomène se produit au sujet des connaissances. Il suffit parfois d’observer certains « vox pop » présentés dans certaines émissions télévisées pour se rendre compte que « l’homme de la rue » est (parfois) complètement ignorant!
Y a-t-il que des sites web comme celui-ci pour aider certains curieux à parfaire leur raisonnement ? Bien sûr existent quelques ouvrages traitant de pensée critique ou de « manipulation », mais j’imagine que c’est majoritairement les « déjà conquis » ou intéressés qui se les procurent!
Bref, je tenais à partager mon constat ici parce que de toute façon nous somme peu à s’intéresser à tout cela dans ma sphère de connaissance personnelle, mais aussi pour profiter de l’occasion pour vous remercier tous et vous encourager à poursuivre! Vous savez, plusieurs personnes viennent surement lire sans pour autant participer. Les sites comme celui si sont une oasis d’information, mais surtout d’apprentissage. J’apprends beaucoup juste à observer les échanges et interaction entres crédules et sceptique!
