curieux a écrit :Si on suppose deux observateurs A et B situés l'un derrière l'autre en attente d'un phénomène observable, le seul qui 'observera' quelque chose sera le dénommé A.
Ensuite il transmettra l'info à B...
Le postulat d'évolution unitaire (décrit par l'équation de Schrödinger, postulat 6) est universel. Ca veut dire qu'il décrit
tous les processus naturels. Or la réduction du vecteur d'état par l'observation (postulat 5), qui est bien un processus naturel, ne peut pas être décrite par un opérateur unitaire.
Il y a donc une contradiction dans la théorie, puisque la réduction du vecteur d'état sort du domaine de définition de l'équation de Schrödinger… qui est pourtant universelle, selon la théorie.
Il faut bien tenir compte du fait que l'introduction du postulat de la réduction du vecteur d'état dans la théorie quantique est
uniquement due à la volonté de nier le théorème d'existence des destinées multiples D'Everett.
Le principe de la réduction du vecteur d'état nous permet de conserver notre
"préjugé" que les autres destinées n'existent pas.
C'est sa seule justification, il n'y en a pas d'autres. Parce que l'évolution unitaire mène mathématiquement à l'existence d'univers multiples.
On a volontairement introduit une contradiction au cœur de la théorie quantique parce qu'on ne veut pas croire aux autres destinées, parce qu'on n'accepte pas que la réalité pourrait être davantage que ce que nous pouvons observer directement.
Le postulat 5 de la réduction du vecteur d'état est donc rajouté artificiellement à la théorie en tant que solution ad hoc. Avec d'ailleurs pour conséquence l'invention par après de la décohérence, pas très satisfaisante non plus, en tant que solution ad hoc à la contradiction que ce postulat 5 a introduit...
Le postulat 5 n'est en réalité par du tout nécessaire pour faire fonctionner pragmatiquement la physique quantique. On peut très bien s'en passer pour travailler, il ne sert à rien. D'ailleurs certains positivistes le nient tout simplement, puisque le positivisme ne s'embarrasse pas de "philosophie quantique"
Maintenant, notre
"préjugé" est quand même un petit peu normal, du fait qu'on ne se perçoit pas en multiple. Pourquoi nous représentons nous en tant qu'entité unique ?
Pourquoi n'avons nous
conscience que d'une seule individualité, si le postulat d'évolution de l'équation de Schrödinger est bien universel et qu'il débouche mathématiquement sur l'existence d'univers multiples avec une multitude d'existences personnelles... qui devraient être perçues subjectivement au lieu d'une seule ?
Puisque notre "conscience" ne perçoit à l'évidence qu'un seul monde d'objet et pas une multitude d'univers, la solution la plus simple serait de penser que le postulat 6 n'est en fait pas universel et que la physique quantique est à revoir, parce qu'elle ne décrit pas absolument tous les processus naturels.
Mais problème, elle n'a jamais été prise en défaut dans le cadre de son travail pragmatique de prévision des phénomènes naturels. Ce qui fait que certains pensent que l'équation de Schrödinger décrit bien tous les processus naturels, sauf un et ce serait la "conscience"... mais qui demanderait alors une refonte complète au niveau du concept.
Et pour répondre plus précisément à ton problème d'observateur par rapport à la "conscience", on peut dire que notre perception d'un monde unique d'objets et d'une individualité propre est un véritable mystère pour la physique quantique.
Parce que les observations sont extricantes (c'est à dire qu'elles révèlent l'observable dans notre monde d'objets) mais elle ne conduisent qu'à une réduction
apparente du vecteur d'état. Et en plus il ne faut pas oublier qu'elles sont
aussi intricantes... parce qu'elles conduisent à une intrication entre le système observé et l'observateur. L'extrication par l'observation est uniquement subjective, ce n'est qu'une perception intime de la part de l'observateur. Et c'est là qu'on retrouve le rapport avec la conscience phénoménale, les qualia :
L'extrication par l'observation est un effet seulement subjectif. L'observation est extricante seulement du point de vue de l'observateur. D'un point de vue extérieur, une observation est au contraire intricante. C'est justement l'intrication entre le système observé et l'observateur qui produit la réduction apparente du vecteur d'état, parce qu'après une observation un observateur ne peut connaître que l'état relatif, au sens d'Everett, du système observé. Tous les autres états ne peuvent plus avoir d'influence sur des observations ultérieures. Mais c'est seulement du point de vue de l'observateur que le vecteur d'état du système observé a été réduit à son état relatif à l'observateur. La réduction du vecteur d'état est seulement une sorte d'illusion, produite par notre point de vue d'observateur intriqué, qui ne connaît de la réalité qu'une infime partie, qui ne peut connaître qu'une destinée parmi des myriades d'autres, toutes aussi réelles.
Tout est très bien expliqué
ici, y compris l'intersubjectivité selon Everett.
Comme tu es familier du formalisme (et pas moi), tu vas voir que la "conscience" a bien à voir avec la physique quantique. Du moins si on veut s'en tenir à l'interprétation réaliste. Maintenant, on peut comme l'auteur et les positivistes, penser que la physique quantique n'est qu'une approximation, qu'elle n'est pas une transduction (merci JF

) fidèle de la réalité et qu'on trouvera autre chose de bien mieux par après. Mais bon, comme son caractère prédictif est impeccable…
Evidemment d'un autre côté, la "conscience", c'est vague et peu satisfaisant comme idée. Le terme a besoin d'être défini (redéfini) pour l'occasion et avec plus de modération et de subtilité que ce que le public en général en pense (voir même changer de mot, pourquoi pas…). Mais on ne peut définitivement pas évacuer tout à fait le concept quand on parle de physique quantique.